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Les Philippines : les trottoirs de Manille.

Les Philippines sont un archipel de plus de 4000 îles (en comptant les cailloux immergés à marée haute)

Population : 105 millions d'habitants. Capitale : Manille : mégapole de 20 millions d'habitants. Langue : tagalog (ou filipino) - anglais. Monnaie : peso philippin. Religion : catholique.

Les rizières de Batad.

J'ai fait un trek de 2 jours dans la Cordillère des Philippines, des montagnes au nord de Manille. De Banaue à Batad dans la province Ifugao.

Il ne faisait pas beau, la pluie, la pluie sans cesse. Les chemins boueux, la boue, la boue sans cesse. J'vous dis pas dans quel état j'étais. Une première journée de marche pénible, avec pour compagnons de route, des sangsues, des serpents et des scorpions. Les sangsues s'attaquent aux chevilles, se cachent dans les chaussettes ou remontent le long du pantalon. Elles tombent aussi des arbres, sur les bras, les mains, dans le cou. Elles font ventouses et se nourrissent de sang. On les voit gonfler au fur et à mesure qu'on se vide. Il faut les arracher, ce n'est pas facile, elles sont gluantes comme des limaces. C'est assez repoussant.

Le scolopendre, heureusement que je l'ai vu. Imaginez si je m'étais assis sur la pierre au bord du chemin !



J'ai passé la nuit dans le village de Cambulo. Un vieux village perdu dans les montagnes hostiles.

Ce sont des Ifugaos, des paysans et des sculpteurs sur bois. Autrefois, c'était aussi de vaillants guerriers et des chasseurs de têtes. Aujourd'hui, les villageois s'ennuient ferme. Le temps doit leur paraître bien long.

Alors ils font des bébés ! C'est un petit village, mais il y a pleins de gamins. Assez pour avoir une école élémentaire. Une école où j'ai assisté à une chose que j'ai vu pour la première fois. Tous les matins, à 8h00, les enfants sont alignés par classe dans la cour de l'école. Ils chantent l'hymne national philippin, la directrice dirige ses troupes comme un chef de chœur. Etant des Ifugaos, ils enchaînent par l'hymne Ifugao. Ensuite ils se dirigent sagement dans leurs classes respectives. Les cours sont dispensés en anglais, en tagalog et en ifugao. Ils sont perdus au fin fond des montagnes, mais les enfants sont trilingues !

Le deuxième jour, le temps était plus clément, et la visibilité meilleure. Heureusement, car le spectacle est sublime ! Les rizières de Batad s'étendent à flanc de montagne, en forme d'amphithéâtre.

Les premières rizières en terrasses ont été construites par les chinois il y a 2000 ans. Elles sont inscrites au patrimoine mondial de l'Unesco.

Je ne suis pas à la meilleure époque de l'année. La récolte a eu lieu il y a déjà 2 mois. En ce moment, les rizières sont en eau. Ça ne manque pas de charme, mais ça ne vaut sûrement pas les rizières vertes qui virent au jaune or juste avant la récolte. On voit que les parcelles sont propres, bien en eau, provoquant un effet miroir. On voit aussi des petites parcelles vertes. Ce sont les semis. Ça veut dire que le repiquage va bientôt avoir lieu.

Il y a 350 niveaux, des centaines de parcelles. Elles sont soutenues par des murets en pierre d'environ 5 mètres de haut. C'est un travail de titans qui a été réalisé il y a des siècles. Ces murets, il faut les entretenir un à un, enlever la mousse et les mauvaises herbes, à la main...

Au milieu de cette merveille -on se demande ce qu'il fait là - il y a un très joli petit village encerclé par les rizières. Batad.


Manille.

Avec 20 millions d'habitants, Manille est la douzième plus grande mégapole dans le monde. C'est dire si il y a du monde !

Comme toutes les capitales, elle a son quartier d'affaires avec ses grandes tours et son côté clinquant. La ville compte une bonne dizaine de malls, ces centres commerciaux géants ou viennent consommer les classes moyennes et aisées. Qui plus est en cette période des fêtes de fin d'année.

Le plus beau quartier s'appelle Intramuros, une cité fortifiée construite par les espagnols qui ont colonisé les Philippines. C'est Magellan qui mit le premier pied à terre sur l'archipel qu'il déclara appartenir à l'empire colonial au nom de la couronne espagnole en 1521. Il mourra aux Philippines lors d'une bataille. A proximité d'Intramuros se trouve le beau parc Rizal, du nom du héros national fusillé par les espagnols.

On peut faire le tour de la cité fortifiée en calèche, mais on peut aussi marcher sur les remparts qui l'entourent, une promenade de 5 km. J'ai été accueilli le premier jour par une pluie fine.

Les fameux trishaws, ou tricycles, harponnent les touristes pour aussi faire le tour du quartier. C'est bien moins cher et plus sympa que la calèche. Ils appellent ça les Lamborghinis. Je pourrai dire que j'aurai conduit une Lamborghini au moins une fois dans ma vie. Malheureusement, les tricycles sont aussi de bien tristes demeures...

En me promenant dans un autre quartier, je vois une station service bien particulière et un client qui ne l'est pas moins. Tout d'abord, les pompes sont suspendues et le véhicule n'est pas commun parce qu'on n'en voit qu'aux Philippines.

Ce sont les jeepneys.

Les fameuses jeepneys circulent jour et nuit. Ce sont de grosses jeeps rallongées et customisées , de vieux tacots roulant à toute berzingue dans les rues de Manille ! Elles symbolisent à elles seules Manille et les Philippines.

Un trajet ne coûte que 8 pesos, soit 15 centimes d'euros, peu importe la distance.

Les chauffeurs s'arrêtent à la demande, on monte et on descend par l'arrière. Elles sont bariolées, de toutes les couleurs, rivalisant d'originalité. Certaines sont rutilantes, d'autres cabossées. Elles sont aussi un peu bruyantes et polluantes, mais c'est fun !


Les trottoirs de Manille.


Le quartier où je suis s'appelle Malate. L'hôtel est bien mais le quartier est un peu glauque. Elles sortent quand il fait nuit, comme les chauve-souris. Elles poussent comme des champignons après la pluie. Il faut garder son calme, et normalement on passe à travers les gouttes. Elles hèlent les passants, mais ne sont pas trop accrocheuses. Il y en a tous les 20m dans ce quartier. Elles sont à la porte des karaokés. Comme je me promène avec mon appareil photo, et une glace à la main, elles voient de suite que je ne suis pas le client qu'elles vont pouvoir dépouiller. Le principe de ces karaokés, ce n'est pas de chanter, mais de faire consommer les clients, les filles touchent des commissions. On les appellent des ladies drinking. Usant de leurs charmes, il paraît qu'elles peuvent vous faire dépenser beaucoup d'argent dans la soirée. Mieux vaut s'abstenir.

Ça ne me dérange pas de les voir là. Je suis à Manille, pas à Lourdes ! Je préfère les voir elles plutôt que le père vivant sur le trottoir avec sa famille qui m'a proposé sa fille de même pas 15 ans...Gros malaise et grosse colère intérieure.


J'en viens à l'extrême pauvreté dans les rues de Manille.

Des taudis leur servent de logement, mais tout le monde n'a pas la chance d'avoir un toit. Ça ne se voit pas mais la famille ci-dessous vit là sur son petit bout de trottoir, y cuisine, y lave son linge, y dort sur des cartons la nuit. Ils restent dignes, propres et souriants.

Je crois bien que c'est la première fois qu'on me fait un doigt d'honneur. Il est beau celui-là ! Et je ne peux même pas riposter, pris au dépourvu par tant de spontanéité.

Les gamins sont livrés à eux-mêmes, pas surveillés, pas éduqués, pas aidés, pas tous aimés quand on propose sa progéniture au premier venu. Les trottoirs sont leur sanctuaire, pourtant ils n'y sont sûrement pas en sécurité, ni physique, ni sanitaire. Pour se donner bonne conscience, quelques passants leur glissent un billet de temps en temps, de quoi survivre.

Il n'y a pas d'âge pour être dans la rue, malades, malheureux, sous-alimentés, démunis, délaissés, oubliés. La souffrance et le malheur n'épargnent personne dans cette saloperie de monde.

J'ai fait allusion aux tricycles comme étant de bien tristes demeures. C'est pour certains, leur outil de travail, leur pré-carré, leur résidence principale. Ils gravitent autour, c'est un lieu de vie, une aire de jeux. Sur le trottoir, dans le caniveau, ils s'organisent. Le père, la mère, les bambinos, la toilette, la lessive, la cuisine, 2 chambres sur roulettes ci-dessous, à l'abri d'un arbre pour les plus chanceux, mais pas à l'abri des odeurs pestilentielles. Ils sont toujours là, à la même place, tout le temps, pas d'horizon, pas d'avenir, pas de chance.

C'est leur 3 étoiles*** au Guide des Trottoirs. C'est souvent un enfant qui dort dedans, mais il n'y a bien sûr pas de place pour tout le monde...

Le monde de la rue est un monde de souffrance et de désespoir. Ces pauvres gens sont en constante recherche de nourriture, atteints par les pires maladies et la violence, vivent et meurent sans avoir connu autre chose que la misère. C'est pire à voir la nuit. Ici ou ailleurs, la misère n'est pas une fatalité, c'est une injustice, née de l'indifférence coupable de ceux qui les gouvernent.


Rencontre avec la mort.


En fin de matinée, je suis allé à la gare routière de Buendia pour me renseigner sur les horaires des bus pour aller au sud de Manille le surlendemain. Je me promène ensuite dans une petite rue animée. Les barbecues des streets food dégageaient des odeurs m'ouvrant l'appétit. Je débouche sur Ocampo Avenue, une grande artère en plein centre de Manille. Il est 13h00. Il fait beau, c'est une belle journée ensoleillée. Je marche tranquillement le long de l'avenue, sans but précis. Quand soudain, j'entends des détonations derrière moi, comme des coups de feu. 5 ou 6 coups. Putain, c'est une fusillade ! Mais je ne vois pas ce qui se passe, c'est dans mon dos. A proximité, les gens s'affolent et les femmes crient. J'ai peur. Je coure aussi. Je vais me cacher derrière une voiture comme les autres passants. C'est quoi ce bordel ! J'ai la tremblote pendant 5 minutes, je ne peux plus bouger. Lui non plus, raide mort !

Abattu en plein jour, les balles en pleine tête, baignant dans son sang encore chaud, les secours ne sont pas encore arrivés. Je suis parti avant l'arrivée de la police. Un témoin pouvant être considéré comme un suspect, j'ai pas voulu avoir d'ennuis, j'ai vite détalé.

J'ai évalué la distance, le mec s'est fait buter 20 mètres derrière moi...Séquence émotion !

L'aventure continue...




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