L'Ethiopie : les tribus de la vallée de l'Omo.
- jpln56
- 26 janv. 2019
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 15 oct. 2022
La vallée de l'Omo se situe au sud-ouest de l’Éthiopie, près des frontières avec le Kenya et le Soudan du sud.
Avant de faire ce voyage, je m'imaginais une Afrique avec des safaris permettant de voir des lions, des éléphants, des girafes, des zèbres, des gnous, etc...Ça fait plus de 4 mois que j'y suis et je n'ai toujours pas fait de safari mais j'arrive bientôt au Kenya et en Tanzanie. Patience...
Je m'imaginais aussi une Afrique avec des tribus avec les femmes qui dansent nues et des guerriers armés de lances. Mais je me disais que c'était l'Afrique du temps des explorateurs et des ethnologues des XVIIIème et XIXème siècles et que tout ça n'existe plus, surtout pas en Éthiopie.
J'avais tort...
La vallée de l'Omo (l'Omo est une rivière qui traverse le sud du pays) concentre une dizaine de groupes ethniques.
On ne peut pas y aller seul, j'ai donc pris une excursion de 4 jours (coût = 580€ tout inclus). Tout n'est pas parfait, c'est cher, un véritable racket organisé. De plus dans les villages on voit bien que tout n'est pas naturel et toutes les photos sont payantes...Il y aurait beaucoup d'améliorations à mettre en place pour revenir à plus d'authenticité et à des tarifs plus raisonnables. J'ai bien peur que la dérive ne perdure, l'appât du gain avant tout. Il faudrait aussi interdire les excursions aux chinois parce qu'ils sont trop cons.
Mais je ne voudrais pas briser le mythe, je vous présente les tribus telles que je les ai rencontrées. Ce furent de grands moments.
Les Banna.

Je n'ai pas rencontré les Banna dans leurs villages mais sur les marchés de Kako et de Alduba. Ça a été de suite un choc de voir ces hommes et ces femmes accoutrés comme ils le sont. Ce n'est pas du folklore pour touristes, je les vois au bord de la route quand je suis dans le 4x4, habillés de la même manière. Les femmes portent des peaux de chèvres en bandoulière ornées de perles et de coquillages.

Les femmes s'enduisent les cheveux d'argile et de beurre, leur donnant une teinte cuivrée qui brille au soleil. On ne peut pas faire plus gras...Ils sont ensuite tressés, l'opération est renouvelée chaque semaine. Certaines portent une calebasse sur la tête pour se protéger du soleil, ce n'est pas fait pour séduire.



Les hommes ne sont pas en reste, mais plus coquets je trouve. Ils portent des gilets tissés, des bandanas ou des serre-tête de perles sur la tête, des colliers magnifiques, des plumes sur la tête. Une fois n'est pas coutume, ils sont plus élégants que les femmes.

Les Hamer.

Les Hamer habitent dans des huttes circulaires faites de branches assemblées négligemment et d'un toit conique en paille. Une seule ouverture permet d'y accéder, elle fait office de fenêtre et de porte et empêche le bétail d'entrer à l'intérieur. Ce sont des pasteurs semi-nomades possédant d'importants troupeaux de vaches et de chèvres. Ils cultivent le sorgho, le millet et le maïs essentiellement.

Ce sont les "cousins" des Banna. Il n'y a pas grand-chose qui les différencie, les femmes ont la même chevelure cuivrée, et portent les mêmes ornements, à défaut de porter beaucoup de vêtements. La femme ci-dessus porte deux colliers en acier autour du cou, ça veut dire qu'elle est mariée, la présence de l'enfant le confirme.

Les Hamer n'ont pas de religion, j'ai entendu dire qu'ils sont animistes, mais je n'ai vu aucun fétiche, du coup je ne sais pas, je ne peux rien affirmer. Par contre les hommes sont polygames et peuvent avoir plusieurs femmes. Vous allez finir par penser que j'insiste sur la polygamie, ce n'est pas par convoitise mais pour mettre en avant la condition de la femme. Vous allez comprendre.
La femme ci-dessous porte les mêmes deux colliers en acier autour du cou. Comme la précédente ça veut dire qu'elle est mariée. Ces deux colliers pèsent plus d'un kilo, ils ne peuvent pas être retirés.

Vous remarquerez la présence d'un troisième collier d'un esthétisme douteux. Il est serti et ne peut pas être enlevé...Il signifie que c'est la première femme de l'époux, la plus respectée par la belle-famille. Ce qui lui donne le droit de porter à vie un bon kilo supplémentaire ! Je n'en ai pas fini avec la condition de la femme, le pire est à venir...Vous n'êtes pas obligés de regarder.

Dans un petit village hamer près de Turmi, il y avait une cérémonie bien étrange à laquelle j'ai participé. C'est une cérémonie traditionnelle encore pratiquée de nos jours et accessible aux visiteurs. C'était la cérémonie de passage à l'âge adulte d'un jeune homme. C'est un rite initiatique appelé "le saut de taureaux" (bull jumping). Le jeune homme initié (le jumper) doit pouvoir franchir une demi-douzaine de vaches (pas des taureaux) alignées, maintenues côte à côte, et cela quatre fois de rang sans tomber sinon c'est la honte pour le restant de ses jours.
Pour l'occasion, les jeunes hommes et les jeunes femmes du village s'y sont préparés de manière complètement différente.

Les jeunes hommes du village se sont préparés longuement en peignant de beaux motifs sur leurs visages et en se parant de superbes colliers de perles multicolores, un serre-tête orné de plumes sur la tête. Certains se sont plus simplement enduits le corps d'huile. Ils sont équipés de fines branches souples prêtes à servir, sans pitié.

Les jeunes filles, issues de la famille du jeune adulte initié, viennent narguer les jeunes hommes. Elles soufflent dans des trompes, sautent, crient et provoquent, réclamant à être fouettées !


Cinq jeunes filles seront ainsi fouettées. C'est un acte barbare, sauvage et incompréhensible. Pourtant ça a un sens, les cicatrices témoignent de la profondeur de leur lien avec le jeune adulte. Presque toutes les jeunes filles hamer portent ainsi des cicatrices dans le dos suite à ce rituel d'un autre âge. Le résultat est insoutenable, les âmes sensibles peuvent s'abstenir de regarder !...

La cérémonie de saut de vaches peut maintenant commencer. Meurtries, mais pas plaintives, les jeunes filles assurent le spectacle en dansant et sautant, soufflant dans leurs trompes, des grelots aux pieds, faisant un bruit assourdissant et envoûtant.

Le jeune homme s'élance, nu, à l'assaut de l'obstacle des bovins.

Il réussira brillamment l'épreuve. Le voilà entré dans le monde des adultes, les jeunes filles lui ont témoigné tout leur amour. Pendant qu'il est félicité par les siens, elles s'en vont panser leurs plaies...
Les Dassanech.


Les Dassanech sont des anciens nomades, aujourd'hui des éleveurs et des agriculteurs travaillant les terres fertilisées par les crues de la rivière Omo proche. Ils cultivent surtout le sorgho, le maïs et des haricots.


Les villages dassanech sont situés autour de la petite ville de Omorate, à vingt kilomètre du Kenya. C'est la région la plus chaude d’Éthiopie, il fait entre 40°C et 50°C toute l'année. Ce qui explique sûrement pourquoi les garde-robes ne sont pas très fournies.
Ils vivent dans des huttes en forme de cocon, comme les afar du désert du Danakil. Des huttes recouvertes de tôles fines épousant facilement la forme des armatures intérieures. Des intérieurs bien entretenus, très propres contrairement à ce qu'on pourrait croire vu de l'extérieur.


Les hommes portent la jupe et les femmes ne portent pas de hauts, les jeunes enfants ne portent rien.

Le village compte environ deux cents habitants. Je vous mets au défi de trouver un village avec d'aussi belles créatures, ce n'est même pas la peine de chercher, vous ne trouverai pas. J'ai trouvé pour vous.
Les filles sont sublimes ! Elles ont les cheveux courts tressés, et elles portent des colliers qu'elles confectionnent elles-mêmes, des colliers de perles de toutes les couleurs qui les habillent de la plus belle des manières.


Les Mursi.
Les Mursi vivent principalement de l'élevage et habitent dans de minuscules huttes recouvertes de paille avec une seule petite entrée. On dirait des nids d'oiseaux retournés.

Les hommes et les femmes portent sur le corps des scarifications importantes comme sur le bras de cette femme en train de confectioner un panier. Elles sont pratiquées au couteau et les cicatrices sont enduites de cendres, ce qui crée une infection. La plaie finit par se refermer en s'épaississant, formant un relief caractéristique. Chez l'homme c'est pour mettre en valeur la bravoure des guerriers, chez la femme c'est un élément de séduction. Avec en plus une calebasse sur la tête, le résultat est probant...

La particularité des mursi, c'est l'ornementation. Ils portent, surtout sur la tête, les objets les plus insolites comme des cornes de vaches accrochées à des cordes et des chaines, toujours dans un souci d'élégance, les hommes comme les femmes.


Mais le plus fantastique, c'est le plateau labial porté par les femmes. Quand elles ne le portent pas, pour des raisons d'inconfort, la lèvre inférieure distendue pendille de façon pas très esthétique.

La mise en place chez la femme de l’ornement labial inférieur appelé dhébé, intervient avant l’âge de 10 ans : après extraction des incisives inférieures, la lèvre est perforée et une cheville de bois mise en place. L’orifice est agrandi d’année en année par l’introduction de cylindres de plus en plus grands, jusqu’à la mise en place d’un grand disque d’argile décoré de gravures.

A l'âge adulte, le disque mesure 12cm de diamètre, il est réalisé en argile et peint de motifs géométriques. Certains anthropologues prétendent que cette mutilation labiale avait pour but de rendre inesthétiques les femmes afin de les protéger les razzias esclavagistes. Cette ornementation n'est plus guère pratiquée chez les jeunes filles et va disparaître avec le temps pour le plus grand confort des femmes.

En ces intenses moments-là, je peux dire que je suis en Afrique, celle dont j'ai parlé au début et que je croyais disparue. Je peux vous garantir que cette Afrique-là, elle donne la chair de poule.
L’Éthiopie est vraiment un pays fascinant ! A ne pas manquer.






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